Les Coréens ont trois façons différentes de calculer leur âge, et même pour eux, ce n'est pas simple.
Quel âge avez-vous? Si vous êtes coréen... ça dépend. En Corée du Sud, il existe trois manières de calculer son âge, rapporte le New York Times. Et c'est aussi compliqué que ça en a l'air.
La première méthode, la plus utilisée, est souvent appelée «âge coréen», tout simplement: vous avez 1 an à la naissance, et vous en ajoutez un chaque 1er janvier. Ce qui signifie que le bébé né le 31 décembre a 2 ans dès le lendemain. C'est la méthode la plus couramment reconnue dans les situations sociales.
Deuxième méthode: celle qui est utilisée par le reste du monde, et qui commence à compter l'âge à partir du premier anniversaire. Ce système est utilisé depuis 1962 en Corée du Sud pour la plupart des situations officielles et juridiques –par exemple, les procédures médicales.
La troisième méthode, la moins courante, est celle de «l'âge de l'année». Comme avec le précédent système, on commence à zéro à la naissance mais on ajoute un an à chaque 1er janvier. Le bébé né le 31 décembre a donc 1 an le lendemain, celui né le 30 novembre n'a qu'un mois à attendre pour avoir 1 an. C'est la méthode utilisée dans le cadre de lois telles que celle sur le service militaire, qui établit l'âge de la conscription obligatoire, ainsi que pour le système éducatif afin de déterminer à quel moment les enfants doivent commencer l'école.
L'origine de ces méthodes de calcul de l'âge, qui remontent à très loin, n'est pas bien connue, selon le professeur Yoon In-jin, spécialiste de sociologique urbaine à l'Université de Corée. «C'est simplement comme ça qu'on fait», constate-t-il. Autrefois utilisées dans d'autres pays à tradition confucéenne, comme la Chine et Taïwan, elles ne sont plus en usage qu'en Corée du Sud.
Yoon Suk-yeol, le nouveau président qui entrera en fonction dans les prochains jours, a promis lors de sa campagne d'abandonner le système d'âge coréen, démarche approuvée par sept citoyens sur dix selon une enquête publiée en janvier.
Si les lois du pays indiquent quel système adopter en fonction des circonstances, de nombreux Sud-Coréens ont du mal à s'y retrouver. Il existe même des calculatrices dédiées en ligne pour déterminer votre âge en fonction de chaque système.
«Si j'essaie de remplir un formulaire officiel coréen ou dans une ambassade étrangère, je ne suis pas sûre de savoir quoi mettre pour mon âge», témoigne Lee Jae-hye, productrice à Séoul qui se rend régulièrement aux États-Unis.
Socialement handicapant
L'âge est un marqueur social qui exerce une influence déterminante sur les rapports sociaux en Corée, souligne le professeur Suh, de l'Université Chung-Ang de Séoul.
«Vous ne pouvez considérer comme vos amis que des personnes qui ont le même âge que vous, explique-t-il. Vous devez utiliser des termes comme “eonni”, “hyeong” ou “oppa” quand vous vous adressez à des personnes plus âgées.» Le premier titre est utilisé pour parler à une femme, les deux autres pour des hommes.
«Ce serait mieux si les gens ne commençaient pas leurs conversations en se demandant leurs âges respectifs et les débutaient sur un pied d'égalité», ajoute-t-il.
La société coréenne est en effet extrêmement hiérarchisée: votre âge y détermine votre place. Sortir de ces rôles met nombre de Coréens mal à l'aise, comme lorsque votre supérieur au travail est plus âgé que vous.
Quoi qu'il en soit, si le futur président tient sa promesse de campagne, beaucoup perdront jusqu'à deux ans à l'état civil. Même si l'âge ne fait rien à l'affaire, gageons que certains y trouveront quand même leur compte.