Le mot de Kat - Vivre ou survivre avec le syndrome de la chaussette dépareillée
Un psychologue et un statisticien ont construit une formule qui exprime le risque de perdre des chaussettes lors des lessives. Plus les lessives sont volumineuses, les types de lavages compliqués et la négligence grande, plus le risque de chaussettes dépareillées augmente.
Marre des chaussettes orphelines ? Pour vous aider à comprendre ce phénomène, un psychologue, Simon Moore, et un statisticien, Geoff Ellis, ont créé une formule pour prédire le risque de perdre des chaussettes : c'est l'« index de perte de chaussette ».
La formule est la suivante : (L + C) - (P x A). L représente la taille des lessives (le produit entre le nombre de personnes dans la maison et la fréquence des lavages dans la semaine). C exprime la complexité des lessives ; sa formule est : t x s, où t est la somme des différents types de lavages (blanc et couleur) dans la semaine et s le nombre de chaussettes lavées dans la semaine. P est une mesure sur une échelle de 1 à 5 qui représente la motivation des personnes qui font la lessive : 1 signifie que la personne déteste faire la lessive et 5 qu'elle aime beaucoup faire la lessive. A est le degré d'attention, qui tient compte du fait que la personne qui fait la lessive vérifie les poches, met les vêtements dans le bon sens pour le lavage ou déroule les chaussettes avant de les laver.
En définitive, plus le volume des lessives est important dans la maisonnée, plus la probabilité d'avoir des chaussettes dépareillées augmente.
Mais en plus de mettre en équation le mystère de la chaussette orpheline, les deux hommes ont mené une enquête auprès de 2.000 personnes sur leurs habitudes en termes de lessives. L'étude a estimé que les britanniques perdent en moyenne 1,3 chaussette par mois soit plus de 15 par an. Au cours d'une vie, cela représenterait une perte de 1.264 chaussettes soit un coût évalué à 3.200 € ! Chaque mois quelque 84 millions de chaussettes seraient ainsi perdues au Royaume-Uni (et donc probablement à peu près l'équivalent en France...).
L'étude a aussi montré que les chaussettes colorées représentent la majorité des chaussettes perdues (55 %). Les personnes vivant dans les Midlands sont celles qui perdent le plus leurs chaussettes (1,64 par mois, soit 20 par an). En moyenne, un foyer ferait 2,45 lessives par semaine soit 127,4 lessives par an. Les hommes affirment faire deux lessives par semaine et les femmes trois.
Les chercheurs donnent aussi différentes raisons expliquant la disparition des chaussettes : la chute derrière un radiateur lors du séchage, le fait d'égarer les chaussettes dans un meuble de rangement, l'utilisation du mauvais type de lavage (une chaussette blanche lavée avec le linge de couleur risque d'être séparée définitivement de sa moitié), les chaussettes qui s'envolent des étendages ou qui sont mal appareillées après séchage.
Ce travail a été sponsorisé par la marque Samsung dans le cadre de la commercialisation d'une machine à laver avec un hublot spécial pour y mettre ses chaussettes. Pour Melanie Rolfe, directrice marketing chez Samsung, « Nous croyons que cette nouvelle étude a finalement résolu le mystère ancien des chaussettes manquantes. »
Le mot de Kat : Adoptez un camembert !
La couche blanche et cotonneuse qui recouvre le camembert est le fruit d'une sélection humaine comme la domestication du chien à partir du loup, révèle une étude menée par des chercheurs du CNRS d'AgroParisTech. Les chercheurs ont analysé le génome de la moisissure Penicillium camemberti, et ont découvert un processus de domestication en deux étapes. Un premier événement a donné naissance à la moisissure bleu-vert P. biforme, qui se retrouve par exemple sur les fromages frais de chèvre. La deuxième étape, plus récente (XXe siècle), a donné la lignée blanche et cotonneuse, P. camemberti.
Ces deux espèces domestiquées, et plus particulièrement P. camemberti, montrent des caractères avantageux pour l'affinage des fromages par rapport à l'espèce sauvage proche P. fuscoglaucum, explique l'étude. Elles sont plus blanches et poussent plus rapidement sur le fromage en condition de cave d’affinage. D'autre part, elles ne produisent pas, ou alors en infime quantité, une toxine potentiellement dangereuse pour l'être humain, et empêchent la prolifération d'autres moisissures indésirables.
L’arbre génétique de la moisissure de camembert Penicillium camemberti.
© Jeanne Ropars et al, Current Biology, 2020
P. camemberti n'est pas le seul champignon domestiqué par l'Homme. La moisissure de roquefort Penicillium roqueforti a elle aussi été domestiquée deux fois, avec l'une des souches utilisées pour le « vrai » roquefort AOC et l'autre pour tous les autres fromages de type bleu. La levure de bière Saccharomyces cerevisiae a elle aussi connu plusieurs évolutions, certaines souches étant adaptées à la fermentation de la bière ou du pain et une autre plus adaptée au fromage, qui assimile plus rapidement le galactose.
Le mot de Kat - Il faut hurler avec les sirènes si l'on veut courir avec elles. Transposition du dicton médiéval.
Vous avez certainement déjà entendu les sirènes assourdissantes des entraînements aux alertes ou des ambulances. Si ces sirènes sont si efficaces, c'est parce qu'elles imitent parfaitement le hurlement du loup, qui a lui-même été sélectionné comme meilleur son possible pour parcourir les plus grandes distances. Un exemple parfait de biomimétisme involontaire.
N'avez-vous jamais remarqué que les chiens se mettent à hurler lorsqu'une sirène d'alarme se déclenche ? Ce comportement exaspérant ne doit rien au hasard : c'est parce que ces sirènes émettent les mêmes sons que ceux de hurlements des loups, révèle une nouvelle étude parue dans Acta Biotheoretica.
Les chercheurs ont analysé le son d'une trentaine de sirènes telles que celles des alertes d’urgence, des ambulances ou des alertes aux tornades aux États-Unis, et les ont comparées avec différents enregistrements de hurlements de loups. Ils ont alors constaté des similitudes troublantes en superposant leurs spectres de fréquences, 89,6 % de sons étant similaires sur cinq paramètres différents.
Pourtant, cette ressemblance ne serait pas délibérée, mais le fruit de la sélection des meilleurs sons possibles pour communiquer sur la plus grande distance possible, explique Hynek Burda, chercheur à l'université tchèque de sciences naturelles et principal auteur de l'étude. Chez le loup, le hurlement sert ainsi à indiquer sa position aux autres membres de la meute de façon à obtenir leur position en retour. Ce signal sonore est notamment crucial pendant la chasse, car il annonce aux autres loups que la zone est déjà occupée par une meute.
Les loups alpha (les meneurs de la meute) commencent sur de basses fréquences, puis les loups bêta poursuivent sur un ton plus haut. Leurs variations hétérogènes servent à donner l'impression d'une meute très nombreuse. Selon les chercheurs, l'évolution naturelle aurait favorisé chez le loup les hurlements avec le meilleur compromis entre l'audibilité (qui augmente lorsque l'intensité de la pression acoustique s'accroît) et la capacité à voyager sur de longues distances, qui s'obtient en diminuant la fréquence.
Mais ce n'est pas tout. Certains animaux ont appris à reconnaître le hurlement du loup comme un signal de danger ou à l'interpréter comme tel. Les faons voient ainsi leur fréquence cardiaque s'accélérer lorsqu'ils entendent le loup, tandis que les charognards sont au contraire attirés, le hurlement signalant qu'une proie a été capturée.
L'Homme pourrait-il lui aussi avoir été sélectionné par l'évolution pour interpréter le son des hurlements (et donc des sirènes) comme signal de danger ? « Bien qu'il n'existe pas de prédateur spécialisé de l'Homme aujourd'hui, les loups représentaient une menace majeure il n'y a pas si longtemps. Les humains auraient donc pu apprendre à interpréter les signaux acoustiques intraspécifiques des loups comme un signal d'avertissement » et donc à les privilégier pour le son des alarmes, suggèrent les auteurs. Une précédente étude a, par exemple, montré que les fœtus voient leur cœur accélérer lorsque les sirènes d'alarme se déclenchent en Israël.
« Nous suggérons que (par hasard) l'efficacité du son des sirènes comme signal d'alerte a été renforcée par une prédisposition sensorielle naturelle (innée) des humains à être alertés par le hurlement des loups, concluent Hynek Burda et ses collègues. Il s'agit là d'un exemple intéressant de biomimétisme acoustique ».