Amis des mots, c'est le printemps, les bourgeons poussent de partout, et toutes ces fleurs, moi, ça me met en joie. Mais les noms des fleurs, quels nids à fautes d’orthographe ! La rose et la tulipe, ça va (un seul P, à tulipe, baptisée ainsi à son arrivée en Europe, au XVIe siècle, parce qu’elle rappelait le tulbent turc, "le turban"). Plus compliqué, où mettez-vous le H du dahlia, le Y du forsythia et le S du fuchsia ?
Vous allez voir, parfois, l’origine de ces noms compliqués nous aide à les écrire... Un grand nombre sont issus de noms de botanistes que l’on a honorés en leur dédiant une plante découverte dans le Nouveau Monde. C’est le cas du fuchsia, originaire d’Amérique du Sud, qui peut aussi se prononcer "fouksia", car il a été ainsi baptisé en l’honneur de Leonhart Fuchs, un des pères de la botanique.
Cet arbuste à clochettes a aussi donné son nom à une couleur que tout le monde écrit de traviole. Eh oui, fuchsia ne s’écrit pas SCH ou SH, mais CHS… comme Fuchs, quoi.
Tous les noms des fleurs ne viennent pas de botanistes
"Des pantalons fuchsia",– et sans s final, parce que, rappelons-le, les adjectifs de couleur tirés de noms sont invariables. J’adore aussi le forsythia, qui donne ces feux d’artifice tout jaunes en ce moment, mais alors pour l’écrire, pardon ! Lui tient son nom d’un surintendant des jardins de la Couronne britannique du XVIIIe siècle, William Forsyth (SYTH, donc même punition pour le forsythia). Le dahlia s’écrit ainsi en l’honneur d’Anders Dahl, botaniste suédois mort l’année où cette plante est arrivée en Europe, en 1789. Dans son Mexique natal, les Aztèques l’appelaient cocoxochitl. Pas plus facile à écrire !
Mais tous les noms des fleurs ne viennent pas de botanistes. La lavande, par exemple, porte sans doute ce nom parce que ses fleurs étaient utilisées lors du lavage du linge. Il y a l’iris, qui en grec veut dire "arc-en-ciel" (on le retrouve dans "irisé"), un nom idéal pour une fleur dotée d’une si grande variété de couleurs. L’anémone vient du grec anemos, "le vent" parce qu’elle "s’ouvre au souffle du vent", nous dit le Robert, tandis que la renoncule tient son appellation de la grenouille, rana en latin, parce qu’elle apprécie les endroits humides.
J’ai déjà évoqué dans le Bonbon sur la langue l’étymologie du coquelicot, qui ressemble à une crête de coq dans les champs de blé, et dont le nom rappelle le chant du coq, "Cocorico !" Et il y a l’étonnante "orchidée", du grec orkhis, "testicule" (eh oui), parce que les premières qui ont été étudiées possèdent deux tubercules suggestifs. N’oublions pas les myosotis, pour leurs feuilles en forme d’oreilles de souris (de muos, la souris et outos, l’oreille – que l’on retrouve dans l’otorhino !).
Et puis, il y a l’aster, "étoile" en latin, pour sa forme, naturellement, de même que la campanule, campanula désignant une petite cloche, et la primevère, qui apparaît au début du printemps (primo vere en latin), et puis et puis, je pourrais continuer pendant des heures mais pour terminer, en ce dimanche de Pâques, pensez que c’est cette fête qui a donné son nom à la si mignonne pâquerette, qui fleurit à la même époque, et vous n’oublierez plus son accent circonflexe sur le A !